Hôtel du Parc, les accords d’Évian entre la France et l'Algérie

09/09/2020

Le 18 mars 1962, une délégation algérienne du Front national de libération (FLN) emmenée par Krim Belkacem signait avec Louis Joxe, ministre d'État chargé des Affaires algériennes, un accord de paix afin de mettre un terme à la guerre d'Algérie. Cette signature eut lieu à l'Hôtel du Parc à Évian, dans le département de la Haute-Savoie.

L'Hôtel du Parc à Évian-les-Bains, aujourd'hui ensemble résidentiel (Photo Angers etc.)..
L'Hôtel du Parc à Évian-les-Bains, aujourd'hui ensemble résidentiel (Photo Angers etc.)..

Situé en retrait de la route qui longe le lac Léman, face au port de plaisance, ce prestigieux hôtel d'Évian-les-Bains n'existe plus en tant qu'établissement hôtelier. Tout en conservant son aspect extérieur, il a été transformé par les promoteurs immobiliers en une copropriété de luxe sous le nom de Résidences du Parc. Au passage, les observateurs noteront qu'une partie de l'appellation antérieure a été conservée.

Et c'est tant mieux car ce lieu est emblématique d'une époque qui a marqué l'histoire de France et de la Ville. Elle rappelle notamment la politique coloniale d'alors. Une ligne de pensée qui allait notamment trouver son terme, au moins sur le territoire algérien, grâce aux accords signés entre les délégations française et algérienne, et ce, après les réunions de mai-juin 1961 et de mars 1962. Deux circonstances pendant lesquelles Évian fut le siège de ces pourparlers.

Les historiens attribuent ce choix à la proximité de la Suisse, pays dans lequel le gouvernement provisoire de la république d'Algérie (GPRA) s'était réfugié. Voisine de ce pays, la cité thermale se trouve à quelques kilomètres des frontières helvètes : à la fois de Genève (44 km) d'un côté et de Montreux (37 km) de l'autre. Sans compter que sur la rive opposée du lac, Lausanne se trouve à 14 km à vol d'oiseau.

Théâtre des négociations franco-algériennes, l'hôtel du Parc, anciennement du Châtelet, à Évian-les-Bains (Photo ville-evian.fr).
Théâtre des négociations franco-algériennes, l'hôtel du Parc, anciennement du Châtelet, à Évian-les-Bains (Photo ville-evian.fr).

Successivement complexe thermal pour ses eaux minérales, puis hôpital de la Croix-Rouge américaine pendant la Grande guerre, l'Hôtel du Parc restera à jamais comme le théâtre des accords d'Évian. Reconnu un temps comme le plus bel hôtel de la ville, cet établissement (anciennement Hôtel du Châtelet) était pourvu d'un immense terrain avec une vue grandiose sur le lac Léman. Sur les cartes postales de l'époque, on s'extasie sur la distance qui séparait la limite de la propriété de la bâtisse elle-même. 

De nos jours, l'immense terrain qui descendait en pente douce jusqu'aux rives du lac a été en partie livré à la spéculation immobilière, repoussant la belle demeure au second plan. La façade sur rue s'en trouve réduite par des constructions de facture plus contemporaine. Subsiste tout de même un accès privé pour accéder à la bâtisse, laquelle a heureusement conservé son charme d'antan. Encore faut-il pouvoir le vérifier, car dorénavant des barrières indiquent l'aspect privé du site.

Tout juste visible du Quai Paul-Léger, l'ancien hôtel résiste fièrement.
Tout juste visible du Quai Paul-Léger, l'ancien hôtel résiste fièrement.

C'est un peu comme si un pan d'histoire locale se trouvait relégué dans les méandres de la chronique ordinaire. Reste qu'en se contorsionnant le cou, le féru d'histoire reconnaîtra aisément les lieux, car, même tronqués de leur vision globale, on les identifie d'emblée. Parions que les copropriétaires de la résidence ont dû s'habituer aux importuns de passage. En tout cas, celui de ce magazine - faute d'en avoir croisé un afin de lui soutirer une autorisation de curiosité - s'est offert le délit d'une intrusion (sans effraction) en passant sous la barrière d'accès. Juste le temps de faire sa photo...