Ces Angevins qui ont rejoint de Gaulle en 1940

10/05/2023

De Londres, où il a appelé à la résistance le 18 juin 1940 en s'exprimant sur la BBC, le général de Gaulle proclamait son refus de l'Armistice que s'apprêtait à signer le maréchal Pétain avec les Allemands. À la suite de cet appel, les Français libres du Maine-et-Loire ont été nombreux à répondre et à vouloir s'engager. C'est l'histoire de ces itinéraires souvent extraordinaires que rappelle une exposition des Archives du Maine-et-Loire.

Le général de Gaulle au micro de la BBC, octobre 1941 (Fondation de la France Libre).
Le général de Gaulle au micro de la BBC, octobre 1941 (Fondation de la France Libre).

Née des suites de cet appel inscrit dans toutes les mémoires, la « France Libre » est une réponse qui exprime d'abord un engagement militaire hors de France de la part de volontaires afin de poursuivre la lutte sous les ordres du général de Gaulle. Si le message fut relativement peu entendu sur le moment, il représente surtout le premier acte de condamnation publique de la capitulation, lui donnant ainsi une dimension mythique. Cette opposition au nouveau régime de l'État français se renforce lorsque les premiers ralliements de l'Empire (Afrique Equatoriale Française et Cameroun) à de Gaulle se rangent sous la bannière de la France Libre. D'autant que dès le 28 juin de cette année le gouvernement britannique reconnaît le général comme étant le chef du gouvernement français.

La France Libre, ce sont d'abord des forces combattantes présentes sur tous les fronts aux côtés des Alliés ; c'est ensuite une voix, celle de Maurice Schumann, qui, après le 18 juin 1940, s'adresse aux Français chaque soir via le canal anglais de Radio Londres ; c'est enfin une force clandestine avec des agents qui sont envoyés en France dès l'été 1940 et opèrent dans le plus grand secret. Ce sera le point de départ de réseaux métropolitains en lien avec le 2e Bureau (BCRA) de Passy. Ainsi, le 2 décembre 1940, Honoré d'Estienne d'Orves est débarqué près de Plogoff et sera le premier agent muni d'un poste-émetteur, alors qu'en 1944, le réseau dispose désormais de 150 postes pour une moyenne de 170 messages échangés au quotidien.

Puis, très vite, la France Libre mène également une action visant à fédérer autour d'elle la résistance intérieure. C'est tout particulièrement la mission de Jean Moulin, arrivé à Londres en 1941 et parachuté en France dans la nuit du 1er au 2 janvier 1942. Son action conduit à la création du Conseil national de la Résistance (CNR), qui reconnaît l'autorité politique du général de Gaulle.

Quant aux Angevins qui ont décidé de continuer le combat, ils viennent en majorité des militaires de carrière en poste hors de France. Ils sont simples soldats ou sous-officiers et ont suivi leurs officiers ralliés à de Gaulle. Quant aux mobilisés de 1939, ils ont rarement opté pour la France Libre à l'issue des combats de mai-juin 1940, de même que rares sont ceux passés de la France occupée à Londres. À cet égard, le docteur Fruchaud d'Angers et l'élève-pilote Roland de la Poype font figures d'exception. Les autres ralliés sont des « expatriés » passés par l'Espagne, tels André Beauchêne et Alfred Carpentier, qui rejoignent l'Afrique via des réseaux, après avoir connu les geôles franquistes.

Toutes les composantes militaires accueillent des Angevins. Il en est ainsi des Forces navales françaises libres, des Forces aériennes françaises libres, des Français libres de la 2e Division blindée, des ralliés de la première heure, des Français libres de l'intérieur (résistance, armée secrète, agents de liaison, opérateurs radio), des Français libres de Maine-et-Loire. Parmi ces derniers, on trouve Eugénie Poilane (1906-2002) de Saint-Pierre-Montlimart, Clément Quentin (1920-2019) du Fuilet, Victor Châtenay (1886-1985) de Doué-la-Fontaine et fondateur du mouvement Honneur et Patrie, Maurice Tardat (1891-1944), chef d'atelier à la corderie Bessonneau et mort au camp de Buchenwald, Bernard Anquetil (1916-1941), détenu au Pré-Pigeon puis fusillé au Mont-Valérien.

Au sein des Forces navales libres, sont cités François Ledevedec (1917-1990) de Saint-André-de-la-Marche, Roger Massin (1923-1996) d'Angers, Maurice Maurier (1919-1997) d'Angers, Marcel Riveau (1920-2013) de la Membrolle-sur-Longuenée… Parmi les engagés des Forces aériennes libres, on retrouve Roland de la Poype (1920-2012), né à Pradeaux ; Jacques Chatenay (1924-1944), né à Doué-la-Fontaine et fils de Victor ; Jean Prédali (1923-1944), né au Lion-d'Angers ; Michel Chatenay (1922-2003), né à Doué-la-Fontaine et fils de Victor… En ce qui concerne les Forces de la 2e Division blindée, on relève les noms de André Beauchêne (1921-2016), André Jeanneteau (1922-2016), Alfred Charpentier (1921-2001) et Philippe de Hautecloque, autrement dit le général Leclerc (1902-1947), qui a séjourné à Grugé-l'Hôpital.

Le 8 mai 1945, après la capitulation, s'achève une guerre de près de cinq ans qui a mené certains soldats des sables du désert au cœur de l'Allemagne. L'heure de la reconnaissance des services rendus à la Nation arrive et la singularité des combattants français est mise en valeur. Parmi les natifs d'Anjou, sont ainsi mis en exergue quelques-uns des hommes qui se sont distingués. Yves Carré de Luzançais dit de la Hautière (1909-1957), originaire de St-Germain-sur-Moine, officier de la Légion d'honneur ; Roger de la Grandière (1916-1944), né à Grez-Neuville, Légion d'honneur ; Harry de Villoutrey de Brignac (1909-1945), né à Soulaire-et-Bourg, Légion d'honneur ; Jean-François Clouët des Pesruches (1918-1957), résistant, officier de la Légion d'honneur. Tous sont nommés Compagnons de la Libération, une distinction qui honore un comportement exceptionnel dans l'œuvre de libération de la France.

(Source texte et photo : Exposition des Archives départementales du Maine-et-Loire).